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gaëna da sylva - Page 3

  • crépuscule oasis

    Vais au point d'eau, l'allure passagère
    où la clairière a le soir à s'épier
    quand la tiédeur cède sous le vent frais
    venu le temps d'organiser la chair

    L'ai-je attendu, ce déclin de l'histoire !
    sous le manteau complice et forestier
    Enrubannée de carnassières gloires
    flotte une odeur, la Vôtre, je le sais

    L'heure avançant, l'épaule dénudée
    monte la lune avec la faim du jour
    par cette combe comme faite pour
    Mes appétits fassent que Vous restiez

    Aussi longtemps vrai que "je t'aime, ja-"
    vibre mon chœur à Votre animalier
    comme prostré, le flair indélicat
    l’œil à l'affût "-mais je ne t'oublierai"

    Sur le tapis d'ombrages cellulaires
    quand le gibier s'aventure au miroir
    visitons-nous de griffe et de mâchoire
    l'organigramme de notre éphémère

     

    Gaëna da Sylva

    tiniak ©2013 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    pour une photographie de Gaëna da Sylva

  • bench holy day

    Au clocher sonnait le rappel
    séculaire et dominical
    des bonnes âmes provinciales
    « C'est l'heure, allons ! Au rituel ! »
    Et ding... Et dong... Eh, Ritournelle !
    On a vu plus gai, pour un bal !
    Aux collets bruissent des crécelles
    (faisant foi de leur principal !)

    Le mois de mai s'est oublié
    chez quelque voisin débonnaire
    faiseur de bons mots, bonne chère
    et moins chrétien que sa moitié
    qui se presse au bras de sa mère
    comme elle tordue et voûtée
    Miséricorde en bandoulière
    et comptant jusqu'au Petit Lait

    Je voyais cela vaguement
    l'esprit troublé par les oiseaux
    qui braillaient parmi les rameaux
    leur tournant le dos, sur un banc
    à ce coin de rue peu passant
    quand les braves sont au repos
    à leur office les dévots
    et tapis tous les mauvais sangs

    Je regardais mes pieds sans faim
    (fis pourtant quelque découverte :
     ce qui circule sur l'inerte
     apparemment n'a pas de fins)
    quand les vieilles de ce matin
    devisant sur l'Homme en expertes
    commentant l'Ordre et le Commun
    s'assirent aux places offertes

    Près de moi ! Ces protubérances !
    Ça y allaient sur les Couillons !
    leurs simagrées, leurs dévotions
    leurs si malingres existences
    - et moi qui flattais le Bourdon...
    tenant chacune son pochon
    vilipendaient les négligences
    « ... au sein même de Sa Maison !... »

    Ne me suis jamais pensé vieux
    - et encore moins vieille pie !
    mais je m'avisais que mon dit
    autrement, mais n'eût pas fait mieux !
    Le ton était presque joyeux
    Le sarcasme avait de l'esprit
    ponctué de francs et coquins ris
    ou de longs soupirs sentencieux

    Le printemps pouvait bien attendre
    Hiver avait un goût sublime
    Je restai là, à les entendre
    (elles me suggéraient des cimes !)
    Si l'on me demande, à tout prendre
    j'aime autant être leur intime
    que de ceux qu'elles voulaient pendre
    ou mettre au cul la carte SIM !

    Elles m'auront laissé sans suite
    m'ayant ignoré tout du long
    (je n'étais qu'un Jeune Couillon
     à peine lavé de sa cuite !)
    et, chacune avec son pochon
    marqué au sceau du Huit-à-Huit
    s'en retourna vers sa maison
    sans raison de prendre la fuite

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    tiniak ©2012 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    inspiré par une photographie de Gaëna Da Sylva
     

  • La couche

    Gaëna da Sylva

    Elle est restée ainsi le coude sous la tête
    seule en chien de fusil dans sa courte nuisette
    le sol doux comme un linge
    absorbant des méninges
    le chant trop vaste
    où les échos nient des contrastes le contour
    puisque, c'est dit, c'en est bien fini des amours

    une grisaille févrière pour écrin
    de pâles bleus passés pour lui prendre la main
    le silence
    dont le vent même n'ose froisser l'évidence

    un lent trouble foncier ravale ce décor...
    Il floute son regard au fond du corridor
    l'y amasse
    à l'abri des cheveux en pluie noyant sa face

    L'avortement d'un cri roulé dans un sanglot
    lentement dégluti puis tenu sous la peau
    maintenant s'évapore
    sans rage, sans effort
    et sans un bruit
    libère la chair envahie de sa douleur
    puisque s'est tue la mélodie connue par cœur

    C'est donc ici qu'elle réside
    le temps de faire place au vide
    sans que rien d'autre ne la touche
    que le vaporeux oubli où la tient sa couche

      

    gaëna da sylva, tu es au centre

    tiniak © 2011 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    inspiré d'artistes flous extraits de © LA CHAMBRE NOIRE de Gaëna da Sylva

  • La chambre de l'oubli

    Une pièce encombrée de choses disparates
    qu'harmonise de bruns le déclin d'un long soir
    Des cadres s'y renvoient des reflets d'acétate
    dans un plan rigoureux au jeu aléatoire
    où des sujets connus aiment traîner savate
    par les lignes de fuite aiguillant les contours
    et d'autres, plus récents, préfèrent jouer petit
    (aurais-je enfin trouvé dans ta photo jaunie
     la chambre de l'oubli où figer mon parcours ?)

    Angles et arrondis se font des politesses
    pour s'offrir un abyme à mettre en perspective
    avec la porte ouverte à ces délicatesses
    que figurent l'arrêt d'une danse lascive
    l'ivoirin velouté à l'intime souplesse
    le brumeux dégradé d'une fatale errance
    la courbe résignée dans sa pose immuable
    la poussière imitant le grammage du sable
    et le pli d'un cheveu accordant ses brillances

    Le regard éperdu s'amourache d'un rien
    balle folle aux rebonds qu'orchestre le hasard
    pour la chromaturgie de l'empan rétinien
    passe d'une vision à l'autre, puis s'empare
    d'un rayon lumineux, d'une ombre et s'en revient
    prendre plus largement mesure de l'ensemble
    que la vie occupée à ses débordements
    quelque part à l'entour reste un oubli béant
    tant que l'œil à l'affût est à ce qui lui semble

    gaëna da sylva

    (aperçu d'un clic)

    tiniak ©2011 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK
    inspiré par une photographie de Gaëna Da Sylva
    "L'exposée..." extraite de sa >CHAMBRE NOIRE<

     

  • Juliette sans abri

     

    412680842.jpg

    Pauvrette
    la chanson que tu as en tête s'articule
    sur l'axe fatigué des tes nœuds et rotules
    où s'arriment
    tes membres décharnés par le manque d'estime
    chacun d'eux si inversement proportionné
    aux plis sous le manteau de ta chair boudinée
    qu'il te pèse
    - quand à leur approche des autres les yeux biaisent
      ton regard,
    de charrier sur le boulevard

    Pas à pas, sombre silhouette
    la chanson que tu as en tête
    défigure
      les rideaux d'aciers tirés sur les devantures
      les néons morts, les chats trop sales
      les taches sur la neige pâle
      les guéridons les pieds en l'air
      et le chien-chien à sa mémère
      qui pisse un coup
      pendant que l'autre pigne et peste à l'autre bout
      "Comme en '40 !"
    Déjà tu plonges ta dérive vers l'Atlante...

    "Oh, marin ! Marin...
      tu soupires
    "Marin ! Marin ! reviens me dire
    "les parfums que l'or dans l'azur
    "agite par les ouvertures
    "Oui, celles qui donnent en plein
    "sur l'océan qui te retient
    "et te respire
    "quand j'ai, le ventre dans les mains
    "rempli de rêves à venir,
    "besoin de rire"
     

    Adieu, vent mauvais, dents qui claquent
    et toute la carne patraque
    La chanson que tu as en tête
    fredonne ton nom : Juliette.

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    tiniak - Ruades © 2010 DUKOU ZUMIN &ditions TwalesK

     

    Illustration et médaillon :
    "Hiver..."
    © 2008 Gaëna da Sylva, photographies